étoile rois mages - 1448

Rogier Van der WEYDEN

Voyage des Mages - 1835 Léopold Kupelwieser

Arrivée des Rois-mages

vitrail Chartres

voyage des rois mages James-Joseph Tissot 1894

Arrivée des Mages

émail

Les Mages devant Hérode

Vitrail  – v. 1420

Rois mages devant Hérode - 1490

Matteo di Giovanni 

les mages devant Hérode v.1200 - miniature psautier Ingebord de Danemark

L'étoile des rois mages livre des merveilles de Marco POLO

L'adoration des mages mosaïque 6ème siècle

L'adoration des mages

1306 -Giotto

Adoration mages v.1400 Paolo di Giovanni Fei

L'adoration des mages

Fra ANGELICO -1434

Adoration mages 1500  Andrea Mantegna

L'Adoration des mages

1640 - Victor Wolfvoet

L’Epiphanie – 6 janvier

 

racontée par le R. P Joseph-Victor THIBAUD

Prédicateur de la Reine de Chypre, duchesse de Savoie – 1648

 

Voici trois rois qui ayant vu une étoile miraculeuse, courent aussitôt à l’adoration du Sauveur : leur exemple est capable d’animer les plus grands à faire ce qu’ils font… Car celui qui suit le mouvement du Ciel ne peut être que fortuné, cela se voit en ces trois rois, qui suivant le flambeau céleste, rencontrent enfin le Sauveur…

Les Mages étaient tous grands seigneurs et versés en astrologie, et comme ils étaient riches et puissants, ils entreprirent au nom de tout leur peuple ce long et pénible voyage et s’acheminèrent vers la Judée. Le mot mage, en langue persane, est autant que scribe entre les hébreux, philosophe entre les grecs ou druide entre les anciens gaulois  Je sais bien que le mot de mage se prend parfois pour un trompeur et un charlatan ou pour un magicien, ici il signifie un sage philosophe.

Ces trois rois donc, prenant les trésors que leur devanciers leur avaient laissé pour cet effet, sortent de leur pays et de la nuit de l’infidélité pour suivre l’éclat de cette lumière céleste qui était comme une grande comète plus reluisante que le soleil. Il y a plusieurs interprétations possibles : certains ont dit que c’était le Saint-Esprit qui conduisait les Mages et qui leur apparut en forme d’étoile ; d’autres ont cru que c’était un Ange, le même qui avait parlé aux pasteurs et il ne faut pas s’étonner s’il parut aux bergers en forme d’ange et aux mages en forme de créature irraisonnable, parce que ceux-là vivaient comme des créatures douées de raison qui avaient la connaissance du vrai Dieu et ceux-ci menaient une vie sans jugement et sans raison, adorant comme divinités des créatures insensibles des ouvrages faits de la main des hommes. Enfin il y en a qui ont cru plus probablement que c’était une vraie étoile créée de nouveau en la moyenne région de l’air pour conduire les Mages au Sauveur, laquelle après avoir fait son office retourna en la matière première.

Cette étoile était différente des autres en quatre choses : primo elle n’était pas au firmament comme les autres, mais suspendue en la moyenne région de l’air ; secundo  sa clarté se conservait à toute heure même en plein midi alors que celle des autres étoiles s’efface en la présence su soleil ; tertio son mouvement était particulier car elle précédait toujours les Mages en leur chemin, s’arrêtant quand les rois s’arrêtaient et avançant lorsqu’ils cheminaient, au lieu de se mouvoir par un mouvement circulaire comme les autres ; quarto ses rayons n’étaient aperçus que par les Mages et non par ceux qui étaient à leur suite, ni par les Juifs.

 

A la faveur de cette guide flamboyante et de ce céleste conducteur, ces dévots princes arrivèrent en la superbe ville de Jérusalem douze jours après la naissance que Notre Seigneur. Si vous vous demandez comment est-ce qu’ils purent en si peu de jours faire tant de chemin, à savoir plus de cinq cent lieues, saint Rémy réponds que ce fut par un miracle particulier… Ils vinrent sur des dromadaires selon la prophétie d’Isaïe et la vitesse de ces animaux est telle qu’ils font de chemin mille stades par jour soit environ quarante deux lieues. Il y a quelques docteurs de l’Eglise qui ont cru que cette étoile leur apparut plusieurs jours avant celui de la nativité de Jésus-Christ.

Quoi qu’il en soit, arrivant en Jérusalem, l’étoile se cache par une providence singulière, pour instruire les Juifs de la venue du Messie. L’étoile ayant disparue, ces rois se persuadent que c’est dans cette ville que le Roi qu’ils cherchent était né, et, croyant qu’un chacun en savait des nouvelles et que c’était une affaire connue de tous, ils s’enquérirent à la porte de la ville : « où est le roi des Juifs qui vient de naître ? »

 

Merveille que ce Roi des Juifs leur ayant été tant et tant promis et ayant été si longtemps attendu, maintenant qu’il est né au milieu d’eux ils n’en ont point connaissance, et des étrangers qui viennent de bien loin en donnent le premier avis. Cette parole courut bientôt au palais et comme la royauté ne peut souffrir aucun rival, Hérode qui régnait pour lors et qui était d’un naturel méfiant se troubla au récit de cette nouvelle, se doutant de quelque trahison en son état : l’Agneau naît et le loup craint, l’innocence entre au monde et la tyrannie redoute, Jésus-Christ est dans une crèche et Hérode tremble de peur dans son palais.

Cependant toute la ville est abreuvée de l’arrivée de ces étrangers et au sujet qui les a arrachés de leur pays pour venir en Judée. Il n’y a ni rue, ni maison où n’en parle, c’est entretien est commun de la cour, c’est le discours des assemblées et du peuple. Hérode cependant comme un renard, déguise en zèle le sanglant dessein qu’il couvait en sa fantaisie, et parle à ces princes d’Orient, s’informe d’eux comme quoi ils avaient laissé leurs royaumes et leurs états pour entreprendre un si long et si fâcheux voyage avec tant de danger de leur vie.

Ils répondent que c’est une langue du Ciel qui les a avertis, une étoile brillante qui les a conduits pour adorer en ce pays un petit enfant nouveau-né que le Ciel leur a déclaré devoir être le Roi des Juifs. Hérode là-dessus s’inquiète de l’apparition de l’étoile et du temps qui s’était passé, et, pour avoir certaine assurance du fait par le moyen des écritures, il assemble les scribes et les docteurs, il appelle les prêtres et les lévites ; tous d’un commun accord répondent qu’ils attendaient un Roi des siècles qui devait naître en Bethléem selon la prédiction de Michée.

 

Avec cette parole, les Mages sortent de Jérusalem pour aller en Bethléem. Or, à peine ont-ils fait vingt pas hors des murailles, que voilà derechef l’étoile qui se montre à eux (sans qu’elle soit aperçue des Juifs) de quoi ils furent tous transportés de joie. Ils suivent ce divin flambeau, si cette petite clarté leur donne un si parfait contentement, quel transport ne ressentiront-ils pas à la vue du vrai Soleil ?

Tandis qu’ils poursuivent leur chemin et s’approchent de Bethléem, cette étoile s’arrête ; ils discourent entre eux du logis de ce Roi qu’ils cherchent, l’un dit : « ce doit être en cette forteresse qui se découvre par tant de chapiteaux, de tourelles et de créneaux ». « C’est peut-être, dit l’autre, en ce palais qui a le toit doré et reluisant où vous découvrez de si belles galeries ».

Mais s’étant approchés, ils voient que l’étoile s’est arrêtée sur une petite et méchante étable et sur un vieux portail à demi abattu d’où elle répandait sa lumière et leur disait tacitement : « c’est ici, ô rois, où loge ce grand roi que vous cherchez, entrez dans cette grotte et vous l’y trouverez en une extrême pauvreté ; vous le verrez en un bout de crèche, entre la paille et le foin et accompagné seulement de bêtes ». Ils descendirent alors de leurs dromadaires, ils mirent pied à terre, et le respect les retenant, ils ne voulurent point entrer là-dedans sans avoir pris leurs plus précieux habillements, mais il est probable, qu’emportés d’une sainte impatience et touchés d’une dévote curiosité, tandis que les serviteurs déchargeaient les chameaux, ils mirent la tête dans ce chétif taudis et regardant de part et d’autre, ils virent dans un coin une petite retraite faite d’une demi couverture et, en celle-ci, une fille si belle qu’elle faisait honte à la clarté du jour  et sa vue seule suffisait pour parure et ornement de tout le lieu, tenant entre ses bras une pièce de Soleil enchâssé au cristal de notre nature humaine.

 

La Sainte Vierge fut un peu effrayée au commencement, et quelque contemplatifs tiennent, que, comme elle entendit le bruit de cette troupe qui arrivait, tant des hommes que des montures qui s’arrêtaient là, elle eut appréhension qu’on ne voulut faire quelque tort à son cher poupon, car elle redoutait la cruauté d’Hérode connue assez de tout le monde pour tant d’actes sanglants qu’il avait exercés, et c’est pourquoi elle cacha son fils entre le foin et la paille mais l’étoile se plaça vitement dessus pour le découvrir. Voyant donc que l’abord de ces gens était pacifique, elle se remit et s’assura.

Les rois cependant ouvrent leurs coffres, tirent les riches robes dont ils se couvrent en leur pays aux jours de leurs actions solennelles, pour assortir et accompagner cette cérémonie de la plus grande révérence qu’ils pourraient. Ils sortent aussi leurs trésors et leurs présents mystiques et, entrant sous ce pauvre couvert à demi ruiné, se jettent de loin contre terre, mettent leurs couronnes en mains, et,  s’approchant, les genoux en terre et traînant leur pourpre et leurs broderies, ils se présentent comme les vieillards de l’Apocalypse aux pieds de l’Enfant, et, dans une profonde humilité, suivie d’une dévotion toute ardente, ils lui offrent l’or, l’encens et la myrrhe et font cette adoration en tout point accomplie.

Et quoi qu’ils ne voient rien de grand, ni de magnifique à l’extérieur, mais seulement une méchante cahute toute rompue, une jeune fille vêtue assez pauvrement, un enfant tremblotant de froid dans une petite crèche, en compagnie de deux animaux, ils ne laissent toutefois de l’adorer pour Dieu, pour Roi et pour Prince souverain de tout l’univers. Quelles paroles devaient-ils dire pleines d’amour et accompagnées de tendresse et de larmes. « Recevez, disaient-ils, nos sceptres et nos couronnes en vos mains, prenez en bonne part l’hommage que nous vous faisons de nos grandeurs royales. Nous connaissons, Seigneur, que la puissance que nous avons relève de vous. Nous savons que la pourpre dont nous sommes revêtus et les couronnes que nous avons porté sur nos têtes, viennent de vos mains libérales, puisque c’est seulement par vous que les rois règnent et que les empereurs commandent, et que, devant votre majesté, il ne doit y avoir couronne en tête, ni sceptre en main qui ne tombe à vos pieds. Agréez donc, ô grand Roi, avec ces petits présents que nous vous offrons, les sincères affections de nos âmes. Ne nous regardez pas de mauvais œil et d’un visage courroucé, bien que nous venions du quartier d’Orient, terre qui vous a été de tout temps ennemie, et où ont commencé les offenses des hommes et le mépris qu’on a fait de votre grandeur. Nous venons avec espérance d’en obtenir pardon, et avec intention de vous demander cette grâce d’en assoupir à jamais la mémoire par une heureuse paix. Recevez-nous donc prosternés à vos pieds, puisqu’il vous a plu de nous donner connaissance de votre arrivée dans en ce monde, et de nous appeler d’Orient pour nous réjouir en votre présence. Nous avons souffert en notre voyage beaucoup de peines, nous y avons couru beaucoup de dangers, nous avons ressenti beaucoup d’inconfort, mais nous tenons tout cela pour bien employé puisque nous avons le bien de vous voir ». Ainsi parlèrent ces princes convertis, au Fils de Dieu, ainsi le reconnurent-ils et l’adorèrent-ils avec toute la soumission qu’ils purent.